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A la Croisée des Chemins
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20 janvier 2009

La bibliothèque idéale

bibliothequeInstitut_2" J'étais dans un long couloir sombre, lambrissé de boiseries et tapissé d'étagères depuis le sol recouvert d'une moquette moelleuse jusqu'au plafond voûté. La moquette était élégamment décorée de motifs géométriques, et le plafond, orné de bas-reliefs représentant des scènes tirés des classiques. Sur chaque corniche trônait le buste en marbre d'un écrivain. Tout là-haut, au-dessus de ma tête, régulièrement espacées, se trouvaient des ouvertures circulaires joliment sculptées qui laissaient passer la lumière dont les reflets illuminaient le bois poli, contribuant à l'atmosphère studieuse de la bibliothèque. Au centre du couloir, il y avait une rangée de tables de lecture, dotées chacune d'une lampe en bronze à abat-jour vert. La bilbiothèque semblait interminable; d'un côté comme de l'autre, le couloir se fondait dans l'obscurité sans aucune fin définie. Mais c'était sans importance. Décrire la bibliothèque était comme aller voir un Turner et se répandre en commentaires sur le cadre. Sur tous les murs, pan après pan, étagère après étagère, il y avait des livres. Des centaines, des milliers, des millions de livres. Brochés, cartonnés, reliés de cuir, épreuves non corrigées, manuscrits, tout. Je m'approchai et posai les doigts sur les volumes immaculés. Ils étaient tièdes au toucher; me penchant, je collai l'oreille contre leur dos. J'entendis un bourdonnement lointain, le vrombissement de machines, des gens qui parlaient, un bruit de circulation, des mouettes, des rires, des vagues sur des rochers, le vent d'hiver dans les branchages, un tonnerre distant, une pluie battante, des enfants qui jouaient, le marteau d'un forgeron -- un million de sons simultanés. Soudain, j'eus une révélation: les nuages se dissipèrent dans mon esprit et, en un éclair de lucidité, je compris la véritable nature des livres. Ce n'étaient pas simplement des mots assemblés sur une page pour créer une impression de réalité -- chacun de ces volumes étaient la réalité. Ces livres-là ressemblaient à ceux que j'avais lus chez moi comme une photographie ressemble à son sujet. Ces livres étaient vivants!"

Jasper Fforde, Délivrez-moi!, chap. 15
(Titre original Lost in a Good Book, traduit par Roxane Azimi)

[La photo est une photo de la Bibliothèque de l'Institut à Paris, trouvée sur le site de l'Académie Française.]

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